Étymologie de « assassin »
Existe-t-il un lien étymologique entre les termes « haschisch » et « assassin » ?
Sur ce sujet, les avis divergent. Dans le Trésor de la langue française informatisé, on peut lire la thèse qui a largement prévalu en Occident depuis les Croisades jusqu'à nos jours : le terme assassin provient de l'italien assassino, assessino, lui-même emprunté à l'arabe hashishiyyin, nom donné aux Ismaëliens de Syrie par leurs ennemis, et désignant les consommateurs de haschich. Cette étymologie et la légende qui l'accompagne ont nourri l'imagination de nombreux auteurs, parmi lesquels on peut citer l'écrivain slovène Vladimir Bartol, le scénariste et dessinateur de bandes dessinées italien Hugo Pratt. Depuis les attentats du 11 septembre 2001, enfin, certains voudraient établir des parallèles, sinon une filiation, entre les méthodes de la secte des assassins et celles d'Al-Qâ`ida.
À l'origine, ceux qu'on appelle les nizâriens ne sont que les adeptes de l'ismaélisme en Perse, c'est-à-dire une communauté chiite minoritaire dans une région sous la tutelle de vizirs sunnites. Sous la direction de leur chef charismatique Hassan-i Sabbâh, parfois surnommé « le Vieux de la Montagne », les ismaéliens prennent le contrôle du fort d'Alamût en 1090 et étendent leur influence en Iran ainsi qu'en Syrie.
Après la mort du calife fatimide Mustansir Billâh, en 1094, une grave scission se produit dans la communauté ismaélienne au sujet de la succession à l'imamat. Al-Mustansir aurait, selon la tradition nizârite, désigné son fils Nizâr comme héritier ; par contre son jeune fils Ahmad gagne l'appui de son beau-père, le vizir Al-Afdhal, qui le place sur le trône avec le titre d'Al-Musta‘lî.
Hasan-i Sabbâh et les ismaéliens de Perse font allégeance à Nizâr et à sa descendance. Les ismaéliens s'emparent de la forteresse de Qadmûs (la Cademois pour les croisés) dans la région du Jabal Bahrâ‘ en 1132 ; Masyâf, la place forte la plus importante, est prise en 1140-1141. C'est ainsi que les ismaéliens nizâriens de Syrie furent dirigés par des délégués envoyés par les seigneurs d'Alamût ; le plus célèbre d'entre eux était Rachid ad-Din Sinan (1162-1192) qui dirigea la prédication ismaélienne en Syrie.
Selon la version Nizarite, l'imam Nizâr, après s'être réfugié à Alexandrie, est attaqué à plusieurs reprises par le vizir Al-Malik al-Afdhal. Finalement l'armée d'Al-Afdhal arrête Nizâr et son gouverneur, et ils sont menés devant Al-Musta‘lî. Le gouverneur est tué sur-le-champ et l'imâm Nizâr meurt emprisonné en 1097. Avant de mourir, Nizâr désigne son fils Al-Hâdî pour lui succéder au trône de l'imamat et ce dernier rejoint Hasan ibn Sabbâh à Alamût. L’Empire fatimide était très affaibli par la crise économique et le manque d’unité parmi les ismaéliens. De plus, le pouvoir militaire entre les mains initialement du vizir Badr al-Jamâlî (un ancien esclave arménien) puis de son fils Al-Afdhal, commençait à décliner, alors que le pouvoir à Alamût subsistera jusqu'au xiiie siècle.
Selon Wladimir Ivanow et Henry Corbin, le petit-fils de Nizâr était amené à la forteresse d'Alamût par Hasan ibn Sabbâh, qui dirigea la campagne nizârienne au nom de l'imam. La situation était analogue à la période de clandestinité, qui prévalait avant la montée des fâtimides, car les imâms restaient cachés à la vue du public pour éviter les persécutions dont ils étaient l’objet. Cette période de l'histoire est très confuse, car nous avons très peu de sources historiques ismaéliennes, la majorité des documents disponibles sont ceux écrits par les historiens sunnites, les plus âpres adversaires des ismaéliens nizâriens. Ces derniers croient que la descendance de Nizâr a survécu mais elle est demeurée cachée du public pour éviter les persécutions. Durant cette période d’incertitude Hasan-i Sabbâh était le représentant officiel qui entretenait une relation privilégiée avec l’imam pour mener la communauté à travers cette période turbulente.
Ainsi les historiens sunnites, ‘Atâ-Malik Juwaynî, gouverneur de Bagdad, Rashid al-din Fadl Allah et l'auteur du livre intitulé Sargudhasht-i Sayyidnâ nous ont rapporté une version partielle et non objective de l'ismaélisme qui s’est développé à Alamût. Hasan ibn Sabbâh était à la fois un homme politique et religieux. Selon Christian Jambet :
- « il créa un réseau de forteresses, permettant de contrôler le territoire alentour, réseau qui, consolidé à partir de 1124 par son successeur Kiya Buzurg-Ummîd, comprenait des zones telles le Rudbar avec Alamût, centre de la nouvelle convocation, le Daylam et la région de Qazvin, le fief de Gerdkuh plus à l'est, non loin de Damghan, la région de Ray, quelques positions au Khuzestan, une forte implantation au Quhistan, entre Nichapur et Qâ’in.».
Les régions appartenant aux ismaéliens nizâriens faisaient face aux différentes attaques de l’armée Saljûqs, de plus les Abbassides voulaient isoler les nizâriens afin de les faire disparaître de la région.
Le fils de Kiyâ Buzurg-Ummîd, Muhammad II, entreprit en 1138 de consolider le petit territoire nizârien, jusqu’à sa mort en 1162. Par la suite, comme la période était plus favorable et plus paisible, l’imâm Hasan ‘Alâ Dhikrihi al-Salâm, le descendant légitime de Nizâr, assuma pleinement la responsabilité l’administration de l’État nizârien. Aux alentours de 1848, des guerriers Sihks en rébellion contre les forces coloniales auraient été confondus avec ce qui auraient été les derniers nizâriens. On sait aujourd'hui que certains groupuscules ismaéliens se revendiquent comme les derniers représentants de la secte des assassins.
Selon Isabelle Baudron, les relations entre les Templiers et les ismaéliens d'Alamût sont attestées dans la chronique de Jean de Joinville, biographe de Saint Louis. L'auteur rapporte la visite du Vieux de la Montagne, chef des nizâriens, à Acre. Il est alors reçu par le roi Louis IX. Au-delà de cette rencontre, il y a un échange de cadeaux entre les deux souverains, rendu possible par un frère prêcheur breton qui parlait l'arabe. Plusieurs fois, les nizâriens ont rendu visite aux croisés à Acre et notamment aux Hospitaliers. Le Vieux de la Montagne avait demandé l'aide de Saint Louis contre les Mongols qui envahissaient la Perse.
Source Wikipédia